| Ce 22. Décembre. 1868.
Genève
123. Montbrillant.
Mon vieil ami –
Serno m’a fait part de cette partie de ta lettre qui me regardait. Tu lui demandes si je continue à être ton ami – Oui, plus que jamais, cher Marx, parceque mieux que jamais je suis arrivé à comprendre combien tu avais raison en suivant et en nous invitant tous à marcher sur la grande route de la révolution économique, et en dénigrant ceux d’entre nous qui allaient se perdre dans les sentiers des entreprises soit nationales soit exclusivement politiques. Je fais maintenant ce que tu as commencé à faire toi il y a plus de vingt ans – Depuis les adieux solennels et publics que j’ai adressés aux bourgeois au Congrès de Berne, je ne connais plus d’autre société; d’autre milieu que le monde des travailleurs – Ma patrie maintenant, c’est l’Internationale dont tu es l’un des principaux fondateurs – Tu vois donc, cher ami, que je suis ton disciple – et je suis fier de l’être. – Voici tout ce qui était nécessaire pour t’expliquer mes rapports et mes sentiments personnels. – Passons à d’autres questions.
Tu dis dans ta lettre à
Serno, que nous avons
faussement posé la question à Berne, en parlant de l’égalisation des classes et
des individus – Cette observation est parfaitement juste quant aux termes, quant
[à]
| la formule dont nous nous sommes servis – Mais cette formule nous a été
pour ainsi dire imposée par la sottise et par l’impénitence finale de notre
auditoire bourgeois. – Ils ont eu la sottise de nous céder; pour ainsi dire sans
combat, le terrain de l’égalité – et notre triomphe a précisement consisté dans
ce fait que nous avons pu constater qu’ils rejetaient toutes les conditions
d’une égalité réelle et sérieuse – C’est là ce qui les a rendus et les rend
encore furieux. – Au reste, j’avoue de bon cœur, que nous aurions mieux fait de
nous exprimer autrement par exemple, si nous avions dit: La suppression radicale
des causes économiques de l’existence des classes différentes, et l’égalisation
économique, sociale et politique du milieu et des conditions d’existence et de
développement pour tous les individus sans différence de sexe, de nation et de
race. – Je t’envoye sous bande tous les discours, moins un, que j’ai prononcés à
Berne – Mr Herzen, m’ayant demandé la permission de les imprimer dans
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le dernier Mohican, c’est à dire dans le dernier No de
son Journal qui a cessé de
paraître faute de public et de lecteurs, je n’ai eu aucune raison de la lui
refuser – Mais je te prie de croire qu’il n’y a absolument aucune solidarité entre lui et moi – Depuis 1863 surtout,
toutes nos relation politiques et maintenant même les relations privées sont
rompues – Il m’avait demandé la permission de modifier dans
son sens le discours que j’avais fait à Berne sur la Russie, en réponse
au discours de mon ami Mroczkowski que tu trouveras dans le Kolokol –
J’[ai
pro]posé, c[omme
tous] mes amis de [la] démocratie socialiste Russe, dont
je t’envoya aussi le
programme,
rédigé d’ailleurs par moi-même, comme la première condition de l’émancipation
réelle, c’est à dire économique, sociale et politique des peuples russes et non
russes enfermés dans l’Empire Russe – la destruction radicale
de cet Empire – C’était trop fort pour Herzen et nous nous sommes
brouillés. – Je t’envoierai aussi le
Programme de l’Alliance que nous avons fondée avec
Becker et beaucoup
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d’amis Italiens, Polonais et Français – Sur ce sujet nous aurons beaucoup à nous
dire – Je t’envoierai bientôt
la copie
d’une grande lettre, – presqu’une brochure – que j’écris
la-dessus à l’ami César de
Paepe – Maintenant quelques mots sur ce qui se passe ici. A Bâle
il y a une grève considérable – qui aura probablement pour résultat d’ajouter
5000 membres de plus à l’Internationale – Genève se montre parfait – Nous avons
eu une grande assemblée populaire, qui a nommé une Commission permanente de
Correspondance avec Bâle – J’en suis et Becker aussi – J’ai trouvé ici, parmi les travailleurs vraiment
des hommes magnifiques – Salue de ma part Engels s’il n’est pas mort une seconde fois – Tu sais qu’on
l’avait une fois enterré – et te prie de lui donner un Exemplaire de mes
discours, aussi bien qu’à M.M. Johann
Georg Eccarius
Schließen Eckariues et Jung.
M. Bakounine.
| Rappelle moi je te prie au souvenir de Madame Marx –
Zitiervorschlag
Michail Aleksandrovič Bakunin an Karl Marx in London. Genf, Dienstag, 22. Dezember 1868. In: Marx-Engels-Gesamtausgabe digital. Hg. von der Internationalen Marx-Engels-Stiftung. Berlin-Brandenburgische Akademie der Wissenschaften, Berlin. URL: http://megadigital.bbaw.de/briefe/detail.xql?id=M0000884. Abgerufen am 05.02.2023.